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Rencontres spontanées - 23 nov 2015

  • vendangeursdevues
  • 23 nov. 2015
  • 6 min de lecture

Claude, 80ans, habitant à Saint Emilion

Place Bouqueyre, Bourg de Saint Emilion.


« J’ai toujours habité là ». Je travaillais en tant que cadre agricole.

Qu’est-ce qu’il y a comme élément particulier à Saint Emilion ? Il y a l’église monolithe ou encore la visite des châteaux qui peut être interessante. Selon lui, pour les habitants, l’été le bourg est invivable depuis le classement UNESCO car tout est aujourd’hui conditionné par et pour le vin.


La carte nous a permis de voir que l’image véhiculée et le paysage vécu ne sont pas si contradictoires. Les populations touristiques se sont incrustées et plus ça va, plus les gens sont exclus. Avant il y avait 3000 habitants et maintenant il n’y en a plus que 700 sur Saint Emilion. Dès qu’une boutique se libère, elle est directement appropriée par un commerce en lien avec le vin.


Marie, travaille au château petit Gravet.

Place Bouqueyre. Habitante du bourg de Saint-Emilion


Il y a pas mal de choses négatives. Cela ne se voit pas beaucoup en ce moment car c’est la saison un peu morte, il y a peu d’habitant et de touristes. Mais par contre l’été, lorsqu’on vit au quotidien à Saint-Emilion, il y a 1,5 millions de touristes qui viennent ici et cela fait beaucoup de monde. Ils se promènent dans les rues et souhaiteraient presqu’on leur propose un circuit fléché dans la ville. Le seul point positif réel de l’inscription c’est que les monuments et le bourg ont été réstauré. Mais sinon la présence au quotidien des touristes représente une forte nuisance surtout sonore, l’été c’est vraiment invivable.

Marie habite à Saint Emilion depuis 2000. Le problème aussi, c’est le stationnement. Il n’y en a pas assez pour répondre à la demande. Il faudrait mettre en place un système de navette depuis la gare de Saint-Emilion, mais la mairie ne serait pas d’accord. L’accueil est pourtant un problème à résoudre. Le bourg a totalement perdu son charme, surtout depuis 6ans. Il y a trop de monde qui vient, ça s’est dégradé. Les gens viennent, se promènent parce qu’on leur a dit qu’il fallait venir. Ils ne sont pas tellement intéressés, ils vont dans des paysages qu’on leur a donné à voir simplement. Par exemple aux grottes de Ferrand, maintenant il y a de plus en plus de monde car elles sont maintenant indiquées dans les guides touristiques. A contrario, les GR n’intéressent pas grand monde, peu de gens les empreintent. Mais pourtant avec l’automne, c’est magnifique.

Les gens vont là parce qu’ils en ont entendu parler, parce que c’est sur un guide. L’oenotourisme, c’est grâce à ce nouveau concept que la gamme des fréquentations de saint Emilion va s’élargir. Généralement, les gens ici ont un temps imparti. C’est souvent pour faire les caves ou aller dans le bourg mais jamais au-delà. Les paysages ne touchent pas tout le monde. Par exemple, le festival Philosophia qui aborde une thématique différente chaque anné a permis de parler du paysage de Saint-Emilion et à sensibiliser certains à ce thème. Mais malheureusement, le culturel a tendance à disparaitre au profit de l’argent. Il y a 25ans dans Saint-Emilion, il y avait des boucheries, épiceries, quincailliers, coiffeurs, etc. Aujourd’hui, il n’y a plus rien à part des boutiques de vin et des restaurants. Qui vit ici? Les gens qui restent, plus personnes ne veut habiter ici. C’est paradoxal par rapport aux touristes que ça ramène. Saint-Emilion a perdu sa « vie ». Les regards des touristes sont formatés et le contexte, qui est autour, est souvent laissé de côté.

L’UNESCO a inscrit le paysage, mais peu de gens sont vraiment intéressés par ce domaine. Pour le percevoir, les gens ont besoin d’être pris en charge. Quand ils se baladent en randonnée, c’est en « rang d’oignons », on se demande même s’ils regardent ou ils marchent. Selon Marie, « la lune c’est un paysage ». Elle est très contente d’y habiter malgré tout. Les préoccupations des touristes sont: le parking, le restaurant, les boutiques, et les photos. Cependant, la visite des châteaux impliquent un regard sur le paysage. Les gens ne regardent que ce qui leur est cadré. La plupart des habitants ont 85 ans, une fois que ces derniers disparaissent, leurs maisons sont rachetées et transformées en maison d’hôte. Le bourg est devenu un musée ouvert voire un parc d’attraction. « Si on faisait comme pour la grotte de Lascaux en construisant un faux Saint Emilien ça marcherait tout aussi bien». C’est regrettable mais Saint-Emilion va dépérir. Le paysage, ce sont les châtelains qui en profitent. « Il faut aller où il faut être ou il faut perte vus ». Les châtelains, on ne les voit jamais dans le village. Avec l’œnotourisme, ils ont joué sur l’architecture car le vin ne suffit plus à lui-même, le but est de le rendre attractif et rentable. Des gens viennent chercher du vin, un grand cru classé. L’œnotourisme est une porte ouverte, et permet de visiter des châteaux mais c’est toujours lié au vin. Est ce qu’on fait une animation, une exposition? Ceux qui ont de l’argent se promènent en hélico, en petit avion pour ne pas s’embêter avec la « populace ». On ne peut pas demander aux gens de s’intéresser aux choses. « Le paysage, il faut le laisser à ceux qui sont curieux ». Il est à préserver de ce tourisme de masse. Le village est usé, Saint-Emilion elle adorait et maintenant trop de gens passent. Il n’y a plus de vie de village. On s’entend bien avec les gens qui restent. On va voir la résidence artistique de Bernard Magrez, au moins il rejoint la connaissance. Des gens n’y viennent jamais, il n’y a que ceux qui habitent dans Saint Emilion. Il s’agit d’apprendre à regarder. Maintenant il y a pleins d’évènements pour que les gens viennent. Toutes les semaines il y a un truc car il faut occuper les touristes. Les Montgolfiades c’est très beaux mais il n’y a pas grand monde car cela ne dure pas très longtemps, 30min.


Mireille, historienne

Place Bouqueyre – Habitante de Saint-Emilion


Dans ce paysage, il y a une charte liée à l’inscription. Est ce qu’on peut laisser une bâtisse en ruine ? Est-ce qu’on perd du patrimoine ? Un des problèmes du bourg c’est de faire en sorte qu’il soit habité. Car est ce qu’ils veulent habiter au milieu des vignes? Il y a des choses étranges car les terrasses, cela n’est pas la tradition du Saint-Emilionais mais on en a quand même car certains en font. Il y a peu de gens qui font des marches, ce ne sont pas des locaux mais des voisins. Mireille habite dans le bourg et fait tout à pied. Elle aime être à l’interieur et à l’extérieur du bourg. « C’est beau partout et tout le temps ». Certains jours on a l’occasion de voir des gens qui travaillent. Il faut appeler son mari Pierre Rucu qui a travaillé sur le petit patrimoine rural diffus et sur les moulins. L’image des gens est celle véhiculée, c’est l’image vendable. Il ne voit pas les vignes, le travail antérieur y compris le petit travail. Sans ce substrat fondamental, on aurait pas cette carte là et le vin. Mais on ne nous parle pas du travail derrière. Faut-il maintenir ou pas des bosquets d’arbres, le parc des châteaux et les arbres car cela n’intéresse personne ? On a un sentiment que l’arbre gèle. On a l’impression que l’arbre est perçu comme une obligation et pas comme une composante du paysage. Les grands châteaux ne sont plus ou beaucoup moins habités. Les gens ont des bureaux donc ils ne vivent pas dedans.


Simon, 83ans, ancien mécanicien de Saint Emilion

Place Bouqueyre – Habitant de Saint-Emilion


Il n’est pas natif, il y est depuis 1962. Quand il est arrivé, le 1er février 62 il s’est installé comme mécanicien avec son frère à la station-service du bourg. Il était ouvrier et il voulait monter un garage. Il s’est dit que ça valait le coup. Puis en 73, il rachète avec sa femme une ruine dans le bourg. Le paysage était beaucoup mieux avant que maintenant. On vivait bien et depuis une quinzaine d’années les gens sont partis. Le jour c’est occupé par les touristes qui font les magasins et le soir à partir de 19h il n’y a plus personne. Avant toutes les maisons étaient occupées. « A refaire je n’habiterais pas à Saint-Emilion ». Maintenant on est agressée par les touristes. Saint-Emilion n’est plus une ville agréable à vivre. Il n’y a que magasins de vins et restaurants. Tout est fait pour le tourisme en oubliant les gens. En 62, les propriétaires n’était pas fortunés et aujourd’hui tout a été bousculé. Les châteaux, qui se vendent, ce sont des gens fortunés qui les rachètent et ils n’ont pas la même mentalité. Dans sa rue ils sont 7 voisins. Avant, il y avait plein d’enfants, maintenant Saint-Emilion se meurt de sa population. Les loyers deviennent aussi très chers, ils ont voulu en faire une ville touristique. Les maisons sont vides et fermés. Peut ceux qui vivent tous les jours cela n’est plus agréable à vivre. Chez lui pour se protéger des touristes qui prennent des photos, il a planté des haies pour se camoufler.



 
 
 

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